Il y a une idö©e reö§ue dont la durö©e de vie frise maintenant le demi-siö¨cle et qui a retrouvö© toute sa vigueur ö  l'occasion des rö©centes catastrophes climatiques. Elle est exprimö©e ainsi : "Comment peut-on dö©penser autant d'argent pour aller sur la Lune et dans l'espace alors que sur Terre il y a tant besoin d'argent pour rö©duire la misö¨re ?" Cette assertion est d'autant plus difficile ö  contrer qu'elle s'exprime simplement et qu'on ne peut qu'öªtre d'accord avec la nö©cessitö© de placer l'aide aux plus dö©munis en töªte de toutes les prioritö©s. ö€ moins d'öªtre inhumain. Mais elle est perverse parce qu'elle met en opposition deux autres idö©es reö§ues : d'une part, l'espace coö»te cher, ne rapporte aucun bö©nö©fice direct ö  l'humanitö© ; ensuite, des budgets diffö©remment rö©partis suffi raient ö  rö©duire les inö©galitö©s.
Sans en traiter les causes. Il y aurait donc, d'un cö´tö©, une puissance riche, cynique et inconsö©quente, capable de dö©penser plus de 100 milliards de dollars pour caracoler dans les cratö¨res lunaires au nom de la science ; et de l'autre, une pauvre humanitö© victime de l'impö©rialisme scientiste des tous derniers maö®tres du monde... La caricature est grossiö¨re mais, bien exploitö©e, elle pourrait priver le nouveau plan d'exploration de la Nasa des appuis nö©cessaires ö  sa rö©alisation. L'ö©mulation dont bö©nö©ficiaient les missions Apollo dans les annö©es 1960 n'est plus de mise et le soutien populaire risque de faire dö©faut. Mais, bien au-delö  du cas amö©ricain et de ce programme emblö©matique, ce qui apparaö®t comme irrö©ductible c'est un besoin perpö©tuel d'explications, de mise en lumiö¨re des mö©thodes et raisonnements du dö©veloppement scientifique et technique. Que ce programme puisse apparaö®tre comme hostile et contraire aux intö©röªts de l'humanitö© est un ö©chec de sa communication ö  relier ses images et ses mythes ö  la rö©alitö©.
Avec Mars au plus prö¨s de la Terre, l'ö©cran ö  fantasmes se redö©ploie, pröªt ö  nous inonder de visions du futur. Une belle occasion de se rendre compte que, de cet astre rouge au zö©nith, ö  ce robinet d'images, des annö©es-lumiö¨re de vide nous sö©parent !